Portrait - Pierre, aventurier coopératif
Mis à jour le 16/01/2025
«Je suis tombé dans le bois un peu par hasard », raconte Pierre Kurjeza, président ARDRIS*. « Pendant ma maîtrise en génie civil, j’ai eu une heure de cours avec un professeur formidable, qui m’a donné envie de poursuivre dans cette voie. Je me suis donc orienté vers l’ENSTIB (École nationale supérieure des technologies et industries du bois), à Épinal (88), pour suivre une formation mixte d’architectes et d’ingénieurs. Sorti de ce cursus, je n’ai pas trouvé de poste directement, je suis alors parti comme chef de chantier en Guyane. »
En pleine forêt amazonienne, du côté de Grand-Santi, il prend en charge la construction d’une école et de ses logements de fonction. « Nous accédions au site en pirogue, se rappelle-t-il. C’était la grande aventure, entre orpailleurs et brésiliens qui débitaient mes commandes de bois en tongues et à la tronçonneuse avec une précision incroyable. »
De retour en métropole, il est recruté comme officier par l’armée de terre, à Saint-Cyr-Coëtquidan (56). Il y suit une formation pendant un an et travaille sous contrat dans le bâtiment. Un problème au genou l’oblige à quitter ses fonctions en 2004.
En 2005, il crée une société de rénovation avec son beau-frère. « À cette époque, je ne pouvais pas monter l’entreprise qui me tenait à cœur, je ne trouvais pas de décennale, je manquais d’expérience pour les assurances. »
Il lui faudra attendre 2008 pour fonder Habitat bois massif, à Montélimar (26), une entreprise de construction de maisons en bois, réalisées avec des matériaux naturels, biosourcés et responsables. Il est l’un des premiers à importer en France le procédé MHM (mur en bois massif contrecloué), venu d’Allemagne, n’utilisant ni colle ni produits chimiques. « Je tiens ma sensibilité écologique de ma maman. Pour l’anecdote, à 11 ans, j’ai gagné un concours et suis parti avec la Fondation Ushuaïa à Bora Bora, pour y comprendre les impacts du réchauffement climatique. J’ai découvert les conséquences des décisions prises à Paris notamment. »
En 2019, il se forme aux techniques de construction en bois-paille. « En plus de son intérêt environnemental, ce type de construction est économique à l’usage », explique-t-il. Avec Olivier Sidler, fondateur d’Enertech, il réalise une maison expérimentale, sans chauffage, dont les premiers retours arriveront d’ici un à deux ans.
Curieux de nature, Pierre cherche à se rapprocher d’une coopérative d’achat, dont il apprécie déjà le fonctionnement démocratique, ayant lui-même essayé de passer en Scop (société coopérative et participative). Il contacte alors les coopératives à proximité (ARTICÔP et SUDCOOP), mais elles sont trop éloignées. Pierre est mis en relation avec Franck Moulettes*, alors futur directeur de la coopérative en création ARDRIS, sur le point de s’implanter dans sa commune, à Montélimar. « J’ai accepté la présidence parce que je suis le plus proche de la coopérative, mais je suis épaulé par trois vices-présidents. Je suis très curieux de voir comment une aventure coopérative se construit. J’apprécie ne plus être seul, pouvoir échanger du travail, faire évoluer mes techniques grâce aux autres adhérents. Et puis, cela me paraît tellement logique d’acheter à soi-même plutôt qu’à un négoce extérieur », conclut-il.
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